Aucun patron requis !
Beaucoup d’employés de l’industrie du jeu vidéo supportent leurs conditions de travail peu idéales en rêvant de commencer un jour leur propre studio et devenir ainsi “leur propre boss”. Et c’est normal ! Qui a envie d’être exploité pour le profit d’autrui quand on pourrait ouvrir sa propre compagnie et bénéficier pleinement du fruit de son travail ?
Les travailleu·se·rs du jeu vidéo ont aussi la chance particulière d’exister dans une industrie où fonder sa propre compagnie, bien qu'inaccessible pour beaucoup, reste plus aisé que par exemple commencer sa propre usine en tant que fabricant de voitures. Un studio de jeu vidéo nécessite moins de capital pour démarrer : pas besoin de machinerie coûteuse ou de matériaux bruts.
Le problème du modèle traditionnel de la “startup”, cependant, est qu’il finit inévitablement par répliquer les pires problèmes existant dans l’industrie du jeu vidéo. Les rares fondateurs de studios qui sont suffisamment chanceux pour démarrer un business avec succès n’auront peut-être plus jamais besoin de travailler pour quelqu’un d’autre, mais cela se fera aux dépens des employés qu’ils recruteront au fur et à mesure que leur business grandit. Leurs employés seront dorénavant ceux qui travaillent pour eux, reproduisant ainsi les relations d’exploitation présentes partout dans cette industrie.
Mais les choses n’ont pas à rester telles quelles ! C’est ici qu’interviennent les coopératives de salarié·e·s: des business qui sont intégralement et démocratiquement possédés par les personnes qui y travaillent. Dans une coopérative, personne ne travaille pour créer des profits pour un actionnaire, et chacun peut gagner le plein bénéfice de son labeur. Quand la coopérative grandit, les nouv·elles·eaux employé·e·s deviennent travailleurs-propriétaires et non pas seulement des employé·e·s recruté·e·s par des propriétaires qui forment une classe à part. La plupart des gens qui débutent une entreprise ignorent complètement qu’il s’agit d’une option !
Il existe déjà plusieurs exemples de coopératives de salarié·e·s dans l’industrie du jeu vidéo, tels que Pixel Pushers Union 512 et Motion Twin (les créateurs de Dead Cells). Et deux des créat·rice·eurs de Night in the Woods viennent de lancer leur coopérative nommée The Glory Society. Les coopératives peuvent aussi être un excellent modèle pour les travailleu·se·rs en freelance, qui peuvent bénéficier de s’unir sous une seule bannière pour vendre leurs services.
Il existe beaucoup de types d’organisations qui s’appellent des “coopératives”, c’est pourquoi nous mettons ici l’emphase sur les Coopératives de Salarié·e·s, ou Coopératives de travail associé. Vous avez peut être également entendu parler des “coopératives de consommateurs” qui sont détenues par les clients (telle que la REI aux États-Unis ou MEC au Canada), mais celles-ci peuvent s’avérer tout autant abusives pour leurs employé·e·s que n’importe quelle autre entreprise. Il existe même des associations de patrons d’entreprises qui décident de se baptiser “coopératives” - mais qui ne sont en fait rien de plus qu’un cartel de boss, les employé·e·s n’ayant aucune chose à dire sur la façon dont iels sont dirigé·e·s (par exemple, au Québec, un groupe appelé “La Guilde” a reçu beaucoup d’attention des médias et clame maintenant fièrement être “la plus large coopérative de l’industrie du jeu vidéo au monde”). Tout cela peut porter à confusion et vaut la peine d’être souligné, particulièrement lorsque l’on évoque la possibilité de débuter une coopérative de salarié·e·s avec des camarades travailleu.se.rs du jeu vidéo qui n’ont peut-être jamais entendu parler de ce modèle d’entreprise.
Comment démarre-t-on une coopérative de salarié·e·s? Game Workers Unite est là pour aider, et peut vous mettre en contact avec l’assistance légale dont vous avez besoin pour fonder une telle entreprise avec vos collègues ! Malheureusement, la plupart des avocats d’entreprise qui aident à former des startups n’ont aucune expérience avec les coopératives. Ils sont souvent habitués à faire signer les travailleu.ses.rs pour le modèle corporate habituel, donc avoir accès à un conseil spécialisé peut-être d’une grande aide pour fonder une co-op. Les détails varient également d’un endroit à l’autre, mais commencer une co-op est une option où que l’on soit. Une autre chose à garder à l’esprit est que les investisseurs en capital-risque ne voudront pas investir dans une coopérative de salarié·e·s, étant donné qu’ils ne peuvent pas devenir actionnaires et récolter le profit de votre travail - ils vont toujours préférer pousser les aspirants entrepreneurs à plutôt débuter des startups corporatives traditionnelles. Cela dit, les coopératives de salariés sont toujours parfaitement éligibles pour des prêts d’entreprise, et les coopératives de crédits ont souvent des deals particulièrement favorables pour celles-ci !
Donc si vous envisagez de démarrer une entreprise ou connaissez des travailleu.ses.rs du jeu vidéo qui sont en train de le faire, contactez votre chapitre GWU local (ou l’international si vous n’en avez pas encore) et demandez leur des renseignements sur les coopératives de salarié·e·s !